Brice Oligui Nguema  / Politique
Pourquoi l’élection de Brice Oligui Nguema est bidon
Publié le : 14 mai 2025 à 17h03min | Mis à jour : il y a 4 jours
Pourquoi l’élection de Brice Oligui Nguema est bidon. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

Pourquoi l’élection de Brice Oligui Nguema est bidon. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

Il y a des choses qu’on peut justifier. D’autres, beaucoup moins. Depuis l’élection présidentielle du 12 avril 2025 au Gabon, ce sont surtout les chiffres qui parlent. Et, en l’occurrence, ils ne disent rien de rassurant.
Dès le départ, plusieurs observateurs ont soulevé des incohérences grossières : des variations de données, des résultats partiels, une opacité troublante. Des faits que le pouvoir en place n’a ni démentis, ni vraiment expliqués. On a préféré le silence, en espérant sans (…)


Dès le départ, plusieurs observateurs ont soulevé des incohérences grossières : des variations de données, des résultats partiels, une opacité troublante. Des faits que le pouvoir en place n’a ni démentis, ni vraiment expliqués. On a préféré le silence, en espérant sans doute que les esprits se lasseraient. Mais les faits sont têtus.

Des chiffres qui changent sans raison

Le plus frappant, ce sont les modifications successives des chiffres officiels. D’un jour à l’autre, les bulletins blancs et nuls varient de manière significative : 25 859 le 13 avril, 16 665 le 18, puis 22 632 le 25. Comment expliquer un tel écart ? On parle ici de plus de 9 000 voix qui disparaissent puis réapparaissent, comme par enchantement. Or, les bulletins blancs et nuls sont comptabilisés dès le dépouillement. Ils ne devraient plus bouger ensuite, sauf erreur manifeste — laquelle aurait dû être documentée et corrigée officiellement. Ce ne fut pas le cas.

25 859 le 13 avril, 16 665 le 18, puis 22 632 le 25. Comment expliquer un tel écart ? On parle ici de plus de 9 000 voix qui disparaissent puis réapparaissent, comme par enchantement.

Idem pour le nombre de votants, passé de 636 606 à 642 632 en moins d’une semaine. Plus de 6 000 électeurs en plus, surgis après coup, sans communication officielle. Où sont les procès-verbaux correspondants ? Qui a voté ? Et quand ? Autant de questions qui restent sans réponse.

Des résultats partiels, en violation des règles

Autre point préoccupant : seuls trois candidats ont vu leurs résultats publiés par la Cour constitutionnelle. Pourtant, huit candidats étaient en lice. Le Code électoral est clair : les résultats doivent être rendus publics dans leur intégralité, quel que soit le score obtenu. Même si un candidat n’a reçu que quelques voix, elles doivent être comptabilisées et annoncées. Cette omission n’est pas seulement une négligence, c’est une entorse aux principes élémentaires de transparence.
Un électorat qui grossit... après le vote
Autre étrangeté : entre le 18 et le 25 avril, le nombre d’électeurs inscrits passe de 908 916 à 916 625. Soit 7 709 nouveaux inscrits… après la clôture du scrutin. Comment cela est-il possible ? Et surtout, ces nouveaux électeurs auraient voté dans l’intervalle, contribuant à gonfler artificiellement le taux de participation. Une farce ? Une opération de rattrapage improvisée ? Difficile à dire, mais le doute est permis.

Un problème de fond

Certains diront qu’il ne s’agit que de chiffres. Mais ce sont justement ces chiffres qui fondent la légitimité d’un scrutin. Lorsqu’ils changent sans explication, lorsqu’on ajuste les résultats au fil de l’eau, lorsqu’on dissimule certains scores, ce n’est plus un processus électoral : c’est une manipulation.
Pire encore : aucune instance institutionnelle ne s’en émeut. Pas de recours, pas d’enquête indépendante, pas de clarification publique. Comme si tout cela était normal. Comme si, au fond, on avait intégré que la fraude fait partie du jeu.

Le silence des institutions

En fin de compte, on efface ici 3 000 bulletins blancs, on fait apparaître là 7 700 électeurs de plus, on tripote les totaux, et hop — l’écart de 11 000 voix est comblé. Mais cela ne suffit pas à combler le trou béant de 24 000 voix manquantes, soit près de 5 % du total. Un gouffre !

En fin de compte, on efface ici 3 000 bulletins blancs, on fait apparaître là 7 700 électeurs de plus, on tripote les totaux, et hop — l’écart de 11 000 voix est comblé. Mais cela ne suffit pas à combler le trou béant de 24 000 voix manquantes, soit près de 5 % du total. Un gouffre !

Ce n’est ni un détail technique, ni une bizarrerie comptable. C’est une alerte rouge. Car une démocratie ne peut pas reposer sur des résultats trafiqués ou instables. Et quand les institutions ferment les yeux, c’est tout le pays qui bascule dans le discrédit et la honte.